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Carnets d'automne
23 avril 2012

"Le feu follet", du cinéma au papier bible!

Que Drieu La Rochelle soit entré dans "La Pléiade" n'est pas anodin, mais essentiellement pour des raisons extra-littéraires. On connaît l'engagement de Drieu dans le fascisme, un fascisme toutefois fort différent du nazisme, car Drieu n'était pas antisémite, et chez lui on ne trouvera jamais de ces immondes pamphlets antisémites comme  on en trouve chez Céline. Ce dandy issu d'un milieu bourgeois, bel homme à femmes - il fut l'amant de Victoria Ocampo -  cultivé, était obsédé par la décadence de sa classe sociale et d'une Europe pour laquelle il ne voyait d'autre avenir que dans un régime fort, ce qui le mena, durant la dernière guerre, surmontant sa répulsion pour le nazisme pur et dur, à collaborer activement avec les Allemands. Logique avec lui-même, il se suicida à la libération. Auteur de nombreux romans et nouvelles, et de quelques textes politiques, il connut la célébrité grâce à deux romans, Gilles et Le feu follet; ce dernier fut l'objet d'une superbe transposition au cinéma dans le film éponyme de Louis Malle, avec un Maurice Ronet dans un de ses meilleurs rôles, et une Jeanne Moreau dans une apparition très brève, mais qui, déjà, crève l'écran par sa personnalité et par son charme. Quand un grand écrivain et un grand cinéaste se rencontrent, c'est le chef-d'oeuvre assuré, et le film de Louis Malle est un chef-d'oeuvre. Ce film, et ce roman, sont l'histoire de la fin de vie d'un homme désabusé, dans lequel on pourrait imaginer Drieu lui-même, incapable de communiquer avec les autres, constamment insatisfait de lui-même et du monde dans lequel il vit, et bien décidé à mourir le soir de cette longue journée qui est un adieu à ses amis les plus proches, incapables de le retenir à la vie. Alors, Drieu sur papier bible c'est la reconnaissance, par-delà les considérations politiques, d'un immense talent, d'une oeuvre qui nous interpelle aujourd'hui autant qu'hier par la profondeur du regard que Drieu pose sur l'échec d'une vie trop ambitieuse dans ses exigences morales et politiques, et de la solitude à laquelle elles condamnent immanquablement. L'oeuvre de Drieu, c'est l'obsession de la décadence, et l'on sait combien ce thème a produit de chefs-d'oeuvre, que ce soit en littérature ou au cinéma, du Satyricon de Pétrone au Guépard de Lampedusa en passant par les Buddenbrook de Thomas Mann.                                               

                                                   Drieu la Rochelle

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