Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Carnets d'automne
25 août 2012

Cosima Wagner, journal

Cosima WagnerIl est de ces femmes, épouses ou amies de grands artistes, qui ont consacré leur vie à noter, jour après jour, les faits et gestes du grand homme auquel elles ont consacré leur vie, et réservé à la fois leur amour et leur profonde admiration; parmi elles on connaît Maria van Rysselberghe, amie et égérie d'André Gide, qui a noté, jour après jour, depuis le 11 novembre 1918 jusqu'au 19 février 1951, à la mort de Gide, les faits et gestes du grand écrivain dans ses fameux  "Cahiers de la petite dame". Mais le cas le plus célèbre est sans aucun doute celui de Cosima Wagner. Il a été question sur ce blog de la fille de la comtesse d'Agoult et de Liszt qui, suite à son divorce d'avec le chef d'orchestre Hans von Bülow, devint officiellement Cosima Wagner en 1870. C'est en 1869, à Tribschen, sur le Lac des Quatre Cantons, où le couple a élu domicile avant de s'installer définitivement à la villa Wanhfried à Bayreuth, qu'elle commence un journal qu'elle poursuivra jusqu'au 12 février 1883, veille de la mort de Wagner. Relatant jour après jour les faits et gestes de son célèbre époux, mais détaillant aussi la lente composition de la Tétralogie, des Maîtres chanteurs et de Parsifal, elle laisse à la postérité ce que la critique a considéré, lors de sa publication en 1976, comme un des plus passionnants documents sur la culture allemande du XIXème siècle. Cosima Wagner était, de par sa naissance aristocratique, une grande dame européenne, comme on l'était encore dans ce milieu privilégié avant la Grande Guerre qui allait définitivement cloisonner les nations; élevée à Paris, mariée à un Allemand, ayant beaucoup vécu en Italie, elle parlait et écrivait couramment le français, l'allemand, l'italien et l'anglais; extrêmement cultivée, elle connaissait toute la littérature européenne, et grâce à son père Liszt, était une mélomane avertie. Cette "Grande dame", comme l'appelaient ses visiteurs, très impressionnés par cette femme qui n'était pas belle mais qui avait grande allure, a jusqu'à ses derniers jours fait de l'oeuvre de son époux l'oeuvre de sa vie. Ambitieuse, autoritaire, mais aussi très fragile, elle imposa au Festival de Bayreuth, qu'elle fit renaître après une longue interruption après la mort du maître, un véritable corset, qui empêcha, jusqu'au jour où elle transmit, en 1911, les rênes du pouvoir à son fils Siegfried, toute évolution dans la mise en scène des opéras wagnériens, mais permit toutefois de le sauver du désastre financier auquel il était condamné. Son journal est plus qu'une simple relation des faits et gestes d'un homme qui était célèbre et célébré dans toute l'Europe, on y lit aussi la vie, souvent difficile, d'une femme privilégiée, dans un monde encore largement dominé par les hommes, mais limitée de par son sexe dans ses activités, soumise à un homme qui pouvait être volage et violent, et face auquel elle n'avait q'un silence respectueux à lui opposer - il y a dans ce journal des pages très émouvantes et surtout des silences qui en disent long sur la vie parfois difficile de ce couple célèbre - mais dotée d'un courage et d'une ambition qui lui permirent de sauver l'oeuvre de celui qu'elle appelle tout au long de ces pages "Le Maître". Ce journal volumineux eut une histoire mouvementée; Cosima l'avait écrit pour ses enfants et petits-enfants afin qu'ils puissent y lire la fabuleuse carrière de leur père et grand-père; après sa dispute avec Isolde, sa fille aînée issue de sa liaison avec Wagner qui fut exilée de Bayreuth, elle le destina par héritage à sa seconde fille, Eva. Celle-ci le caviarda allègrement, raturant des passages qu'elle estimait ne pas devoir être dévoilés - ces passages purent tous, à l'exception de quelques lignes, être rétablis lors de sa publication - et le laissa en héritage aux Archives Wagner qui allaient passer à l'Etat Bavarois après la Seconde Guerre Mondiale, et ce sous réserve d'une interdiction de publication durant 30 ans après sa mort qui survint en 1942. Sorti du coffre où il était conservé à l'expiration du délai, il fut publié dans sa langue originale en 1976. Gallimard en édita une version française en quatre volumes en 1979. 

Cosima Wagner 1"Journal" Cosima Wagner  GALLIMARD  (1979)  -  les 4 volumes 119€.  On trouve les 4 volumes d'occasion de 130 à 350€.

Publicité
Publicité
Commentaires
Carnets d'automne
Publicité
Archives
Albums Photos
Visiteurs
Depuis la création 114 467
Carnets d'automne
Publicité