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Carnets d'automne
27 septembre 2012

"André Gide l'inquiéteur" Tome II

André Gide 1

André Gide 2

 

 

 

 

 

 

 

" André Gide l'inquiéteur"  Frank Lestringant  FLAMMARION  2 volumes

 

Le tome II de la passionnante biographie de Gide par Frank Lestringant est enfin sortie! Le biographe n'a pas scindé son ouvrage en deux volumes par hasard,  le premier tome se terminait en effet sur une date capitale dans la vie de Gide, ce 21 novembre 1918, quand, de retour d'un voyage en Angleterre avec Marc Allégret, il apprenait que Madeleine, son épouse, avait brûlé toutes les lettres, plus d'un millier, qu'il lui avait envoyées depuis qu'ils se connaissaient. C'était pour Gide comme la mort de toute une part de son existence, un drame dont il ne se relèverait jamais, un drame qui est à la fois mort et nouvelle naissance, mort de sa complicité avec une Madeleine qui était jusque là omniprésente dans son oeuvre, la dominait et la justifiait, naissance d'un amour, celui pour le jeune Marc Allégret qui va mettre fin à son oeuvre de fiction, à l'exception de son seul roman, les Faux-monnayeurs. Gide se consacrera désormais aux documents et à la mémoire. Cette biographie souligne, si besoin en était, les liens étroits entre la biographie et l'oeuvre chez Gide, plus que chez tout autre écrivain, une oeuvre qui répond à un besoin vital, celui d'exprimer sa lente évolution d'homme marqué par un puritanisme qui l'étouffe vers un état d'homme libre, celui de cet "Immoraliste" qui fera sa célébrité. D'où l'intérêt de lire son oeuvre dans l'ordre chronologique, telle que nous la présente d'ailleurs Frank Lestringant. Oublions les Cahiers d'André Walter - Gide n'était guère poète - pour nous arrêter à Paludes, amusante et brillante satire du monde étouffant des littérateurs symbolistes que fréquente alors Gide, notamment Mallarmé qu'il ne cessera d'aimer et d'admirer, ouvrage dans lequel on sent déjà percer un hédonisme qui sera l'objet de son oeuvre sans doute la plus brillante, trop brillante peut-être, ce qui la rend presqu'illisible aux lecteurs d'aujourd'hui, Les nourritures terrestres, après laquelle il s'éloigne définitivement des symbolistes. L'immoraliste, son oeuvre la plus célèbre, et La porte étroite sont imprégnées de la présence de Madeleine, que Gide vient d'épouser, oeuvres marquées par cette soif de liberté morale qui ne le quittera plus jamais, en même temps que par cette obsession du péché, fruit de son protestantisme, qui le rapproche de son contemporain, admiré mais souvent combattu, qu'est François Mauriac; obsession qui constitue le thème de La symphonie pastorale, son livre qui a eu le plus de succès auprès du grand public, succès dû en grande partie au film qui en a été tiré par Jean Delannoy, film assez médiocre qui doit beaucoup à la beauté de la jeune Michèle Morgan dans le rôle de Gertrude, livre finalement assez mièvre qui enchanta un Claudel qui voyait Gide se convertir bientôt - il dut très vite déchanter -  et qui, selon Frank Lestringant, ne fut jamais vraiment pris au sérieux par Gide. C'est dans Les caves du Vatican que Gide put exprimer, avec une audace qui choqua les contemporains, sa liberté morale, célébrée par l'"acte gratuit" de Lafcadio, personnage très stendhalien, jeune et beau, impertinent et arrogant, libre de toute morale, qui, après la guerre de 14-18, sera l'idole de toute une jeunesse déboussolée. La rupture avec Madeleine, la rencontre avec Marc Allégret, mettront fin à cette brillante période du Gide-romancier. Devenu une sorte de gourou de la jeunesse libérée, Gide écrira son seul et unique roman, ou qu'il définit comme tel contrairement aux "soties" précédentes, Les faux-monnayeurs, qu'on peut considérer plus qu'un hommage à Marc, comme une plaidoirie pour la littérature et pour le roman tels que les voyaient Gide. Gide, nobélisé, statufié, entouré d'une famille construite sur mesure qui comprenait, outre Marc Allégret, la Petite Dame, la fille de celle-ci, Elisabeth, qui lui fera un enfant, qui est Catherine Gide, jusqu'à sa mort allait désormais se consacrer aux voyages, à la dénonciation de l'exploitation, qu'elle fût coloniale ou communiste, de l'homme par l'homme.

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